Quand j’ai supprimé Waze et Google Maps, Yuka et TousAntiCovid, mes photos et mes images, et que mon téléphone s’est retrouvé quasiment vide, j’ai enfin pu mettre à jour ma messagerie instantanée. Mon portable n’a que seize mégaoctets, je ne sais pas ce que c’est mais ce n’est pas assez. Je ne suis pas une smartphone’s victim, mais il a bien fallu que je me résigne : j’ai besoin d’un nouvel appareil, dont la mémoire ne flanchera pas. Plus puissant et fonctionnel, allez on y va !

 

Rendez-vous sur BackMarket, j’approuve le concept. La société récupère et reconditionne ordinateurs, tablettes et smartphones. Je lis sur un site que l’Ademe[1] cautionne : en optant pour un téléphone reconditionné, j’évite l’extraction de quatre-vingt-deux kilos de matières premières. Et la production de vingt-trois kilos de gaz à effet de serre. Je fais aussi chuter l’impact environnemental[2] de 87 %[3]. Bigre ! Je ne croyais pas si bien faire ! Je me félicite en naviguant.

 

Le principe est simple et écolo. Tout se recycle, rien ne se jette. On économise la planète, et ses pépètes. Contrairement à son homologue d’occasion, le téléphone reconditionné est passé entre les mains d’un pro. Après de nombreux contrôles, réparations, remises à zéro… il a reçu une deuxième vie. Et son acquéreur une garantie. La Terre lui en sait gré dont les hôtes pourraient bientôt mourir de chaud. Idem les quarante mille enfants de la République démocratique du Congo, qui extraient du cobalt pour doper nos batteries[4]. Aux jeunes marcheurs pour le climat je réponds tout de suite : la planète, je la préfère bleue que bien cuite. Le site propose même de racheter mon vieux mobile chinois qui ne vaut pas tripette. Moi je vous le dis, vive la French tech !

 

Il en va des personnes comme des smartphones. Nous pouvons tous avoir une seconde vie. Elle commence quand on en a fini. Avec notre arrogance, nos prétentions. Nos fausses croyances, notre présomption. Nos « moi je », nos « oui mais », nos « ben si ». Nos vaines quêtes de sens. Nos limitations toutes humaines. Quand nous acceptons notre obsolescence. Nos saturations. La nécessité de changer d’existence. Quand nous ne croyons plus en rien ni en nous-mêmes. Quand nous en avons par-dessus la tête des adversités mais que ça ne les empêche pas de nous submerger. Quand nous avons voulu tenir de toutes nos forces : nous avons battu le rappel mais elles ne sont pas venues. Quand nos chemins ont plus de creux que de bosses, quand on se sent dépassé, bon pour le rebut.

 

Certains optent pour le développement personnel, la positive attitude, la détox émotionnelle, la zen plénitude, le coaching sensoriel, les exercices de motivation, les praticiens PNL[5], la loi d’attraction, les constellations familiales et la psychogénéalogie, la force du Graal ou la reikiologie, les énergéticiens magnétiseurs, les formatrices en bonheur… Ils parviennent parfois à lâcher la soupape mais ne changent jamais de cap. Ils maintiennent tant bien que mal la trajectoire. Et puis un jour la panne, l’écran noir. La résignation ostensible. « Quand on n’aime pas sa vie, quand on sait qu’il faut en changer, on n’a pas le choix, n’est-ce pas ? Que faire pour être un autre ? Impossible[6]. »

 

D’autres, reconnaissant leur besoin urgent d’être remis en état, se tournent avantageusement vers leur Concepteur : qui saurait, mieux que lui, leur offrir un nouveau départ ? Dieu ne met aucun de ceux qui l’appellent au placard. Aussi dépassés soient-ils par les événements, ou la technologie, il les réinitialise tous avec un amour infini. Il réinstalle, reformate, remet au monde, répare. Ceux qui se laissent reconditionner par le Dieu d’éternité vivent avec lui leurs plus belles années.

 

Le cas de l’apôtre Pierre est édifiant. Victime de l’effet « meilleur que la moyenne[7] », il pense être le plus grand : si les autres disciples étaient ébranlés dans leur foi, lui ne faillirait sûrement pas[8] ! Pierre-le-fanfaron renie pourtant son ami Jésus à trois reprises. Au chant du coq. Ce n’est pas faute d’avoir été prévenu. Pierre se découvre et se dégoûte, c’est un choc. Il est brisé, hors service. Dépité, déçu.

 

Pierre pleure à chaudes larmes. Il prend conscience de son état calamiteux. Il pourrait fuir, rendre les armes. Disparaître ni une ni deux. Après moi le déluge. Mais il choisit de revenir à Jésus, le juste juge. L’apôtre se laisse reconditionner par ses soins. Le service est gratuit. Et extraordinairement efficace. Pierre version 2.0 soutiendra et fortifiera ses amis. Et, à travers ses missives, des millions de chrétiens. Quelle grâce !

 

J’ai acheté un téléphone reconditionné. Je crois que j’ai bien fait. Il appartient aux hommes d’en appeler à Dieu s’ils veulent changer de vie. À nos smartphones on ne demande pas leur avis. Fin de l’analogie.

 

Si nous reconnaissons nos péchés, il est fidèle et juste et, par conséquent, il nous pardonnera nos péchés et nous purifiera de tout le mal que nous avons commis.

1 Jean 1.9

 

[1] Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

[2] Impact environnemental annuel sur l’empreinte « changement climatique ».

[3] « Impact environnemental des smartphones : le reconditionné fait de 77 à 91 % mieux que le neuf », Raphaël GUASTAVI, chef du service Ecoconception & Recyclage, Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), The Conversation, 19 janvier 2022, https://theconversation.com/impact-environnemental-des-smartphones-le-reconditionne-fait-de-77-a-91-mieux-que-le-neuf-174976

[4] « Mon smartphone est-il lié au travail des enfants ? » Amnesty International, https://www.amnesty.org/fr/latest/campaigns/2016/06/drc-cobalt-child-labour/

[5] Programmation neurologique et linguistique.

[6] Albert CAMUS, La Chute, Folio Gallimard, 1956, p.150.

[7] L’effet « meilleur que la moyenne » peut être résumé ainsi : quand on demande à un individu de se comparer à une « personne moyenne » dans un domaine de compétence ou sur un trait de personnalité donné (par exemple l’intelligence ou la gentillesse), il aura tendance à se juger supérieur à celle-ci. E. ZELL, J.E. STRICKHOUSER, C. SEDIKIDES & M.D. ALICKE (2020), « The better-than-average effect in comparative self-evaluation: A comprehensive review and meta-analysis », Psychological Bulletin, vol. 146, p.118-149.

[8] Matthieu 26.31-33.

DISPONIBLE MI AVRIL

 

 

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